Alors que la question qui vient à l’esprit de beaucoup lorsqu’il s’agit de présenter une communication scientifique a souvent trait aux aspects techniques de la présentation (gestion du temps, supports…), Luc van Campenhoudt propose un tout autre regard sur la question.
Il s’agit en effet de s’intéresser en premier lieu à la fonction d’une telle présentation orale dans le processus de validation de travaux scientifiques. Pour cela, un petit détour par l’épistémologie s’avère heuristique: selon Van Campenhoudt, le critère ultime de la validité scientifique est en effet l’inter-subjectivité dans la communauté scientifique. Plus que la méthode, la discussion entre scientifiques validera ou non un travail (même si la communauté peut avoir ses propres dérives) puisque tous les autres critères de validité scientifique (méthode, pertinence de la problématique…) seront discutés à cette occasion.
Ayant cela à l’esprit, nous comprenons alors que la communication scientifique est une « composante normale » du travail de recherche et constitue une étape parmi d’autres durant le processus de validation scientifique et non pas son aboutissement. Dès lors, les questions techniques liées à la présentation se résolvent d’elles-mêmes puisqu’elles n’auront qu’une ambition : permettre le débat et donc, l’avancée de la recherche en question.
L’exposé doit donc être conçu pour être discuté. Posture qui impose de ne pas cacher sa « vulnérabilité » : une communication scientifique doit en effet aborder les faiblesses ou problèmes de la recherche en question afin de les surmonter grâce à la réflexivité de la communauté scientifique. Pour cela, une préparation préalable répondant à plusieurs critères/objectifs s’impose.
La clarté de l’exposé est essentielle. Les éléments clés de la recherche doivent faire l’objet d’une préparation minutieuse afin que l’auditoire puisse se saisir des enjeux de la communication. Les concepts utilisés, la construction de l’objet, la méthode mise en œuvre ou encore les résultats ainsi que leur construction doivent être clairement exposés. Très concrètement, les notes de l’exposant peuvent ainsi se limiter à ces quelques éléments. Si la communication s’attache à l’essentiel, la lecture, souvent fastidieuse, d’un texte préalablement préparé devient superflue et la qualité de l’échange en sera d’autant plus améliorée.
Il faut en effet garder à l’esprit que la communication s’inscrit dans un échange. Cela implique de porter un soin particulier à la prise en compte des circonstances de la communication. A qui s’adressent-elle ? Le contenu ne sera en effet pas le même s’il s’agit d’un public de spécialistes de la question, ou d’un public plus large et moins averti sur le sujet. Quel en est l’objectif ? S’agit-il d’expliquer des résultats comme lors d’un séminaire pluridisciplinaire ou de discuter des travaux en cours ? La « vulnérabilité » sera par exemple plus facilement affichée dans un contexte de discussion de travaux en cours que lors d’une présentation des résultats.
Quelque soit le contexte, certains conseils valent toujours : sobriété, efficacité, calme et clarté. La logique d’échange durant ces communications implique également un partage du temps avec d’autres exposants. Cette contrainte du temps ne doit alors pas être envisagée de manière négative. Le temps est un élément à prendre en compte lors de la préparation de l’exposé et ne doit pas être objet de plainte : c’est une condition à laquelle il faut s’adapter et adapter le contenu de la communication.
Cette étape importante du processus de recherche doit donc être démythifiée. Il faut l’aborder de manière sereine, avec pour objectif de faire avancer ses propres recherches. Certains comportements sont donc à proscrire durant ce type d’exercice : la recherche permanente de belles formules, de grands effets de rhétorique qui seraient en contradiction avec l’objectif de la présentation. De même, face aux critiques (qui peuvent parfois paraître rudes, tous les chercheurs ne « jouent pas le jeu » de l’inter-subjectivité comme objectif primordial…) il faut rester dans la logique du « métier » de chercheur et de toutes ses implications : ce n’est pas l’individu qui est attaqué mais ses recherches. Il faut donc s’attarder à l’aspect constructif et professionnel de telles critiques et ne pas se laisser submerger par les ressentis personnels.
En somme, s’il fallait résumer en une phrase les conseils évoqués lors de cette séance du séminaire, nous dirions que pour préparer une communication dans un cadre scientifique, l’essentiel est d’agir dans la logique du métier de chercheur.
Compte-rendu rédigé par Maxime Godefroy (Université de Lille II, CERAPS)